IL NE DEVRAIT PLUS Y AVOIR DE HONTE À SE DÉPISTER…

Deuxième samedi du mois, nous sommes le 13 mai et je consulte au Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit. Le CDAG qui au fil des évolutions et des réformes est devenu CeGIDD (Centre Gratuit d’Information, de Dépistage et de Diagnostic des infections par les virus de l’immunodéficience humaine, des hépatites virales et des infections sexuellement transmissibles).

Au fil des consultations j’ai pris l’habitude de croiser des personnes angoissées et tendues. « Se faire dépister », ce qu’on raccourcit volontiers en « se dépister », n’est jamais simple car cela induit questionnements et tensions émotionnelles. C’est probablement ce qui explique une partie du succès des TROD dont les résultats sont immédiats, limitant ainsi angoisses et questions.

Mais ce matin, lors de la consultation j’ai croisé ou plutôt j’ai essayé de croiser le regard d’une jeune femme. En plus de l’angoisse habituelle, j’y ai vu une expression franche de honte. Elle regardait le sol, aurait voulu disparaître dans un trou de souris.

J’aurai dû lui dire :

« Mademoiselle, faites l’économie de la honte, la peur est déjà suffisante.
Ici, personne ne vous juge ni ne vous surveille. C’est pour cela que nous tenons tellement à la gratuité et à l’anonymat. Nous savons qu’il y a plein d’autres façons plus conventionnelles de se faire ces tests… Mais l’affrontement est alors plus difficile…
Ici, pas de honte ! Nous sommes là pour vous dépister, mais nous voulons surtout prendre soin de vous. Nous sommes là pour informer, rechercher des virus, mais aussi traiter ou vacciner quand cela est possible ! Pour toutes ces raisons, venez comme vous êtes, mais sans honte !  »

J’aurais voulu dire tout cela mais je n’ai pas pu, alors je l’écris : « Pour se dépister il faut zapper la honte. »

Mais pour parler les médecins doivent peut-être aussi quitter leur propre honte.

Pascal Mélin

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