VICTIMES…

« Les victimes des attentats bénéficieront de soins de santé totalement gratuits », c’est ce qui a été publié dans les pages du Journal Officiel de la République.

Pour certains étymologistes latins, le mot victime viendrait de vincere, qui veut dire gagner, donc celui qu’on sacrifie au retour de la victoire, pour d’autres de vincire, qui signifie lier parce qu’on liait la victime.

Dans les deux cas, le mot « victime » sous-entend bien qu’il y a un persécuteur et un persécuté. Mais c’est quoi au fond être une victime ?

Et quel est le point commun entre les victimes de contamination et les victimes d’attentats terroristes ? Il y a aussi les victimes collatérales, les victimes du devoir, les victimes de guerre ou bien encore les victimes d’accident médicaux.

Alors oui ! Prendre en charge les victimes survivantes à des attentats à 100% est un minimum ! Mais que fait-on pour l’entourage des victimes décédées ? Et, poussons le raisonnement un peu plus loin. La plupart des terroristes ont été abattus, mais on nous a expliqué qu’ils avaient été radicalisés, alors ne sont-ils pas aussi des victimes ? Cette suggestion peut heurter les esprits car pour nous, ils sont avant tout coupables… Alors quelle distance adopter et quelle place pour le soin entre victimes et coupables ?

Et pour l’hépatite C, peut-on considérer tous les gens porteurs comme des victimes ? Pour ceux contaminés lors de transfusion ou de soins médicaux ça semble une évidence mais que penser des autres, les toxicomanes, eux qui ont été coupables d’avoir transgressé la loi ?

Certains d’entre eux seront philosophes se disant : « Après tout, c’est de ma faute ». Mais d’autres penseront : « Si les échanges de seringues avaient été une évidence et mis en place depuis toujours je n’en serai pas là aujourd’hui ! » Et les deux attitudes sont compréhensibles et respectables…

Ensuite, où s’arrête le périmètre de la victime ? Ce que nous, malades, avons appris, c’est que nous ne sommes pas les seules victimes de nos virus : nos enfants, nos compagnons, nos familles sont également des victimes qui ne sont pas reconnues, en dehors des consultations d’éducation thérapeutiques.

Finalement, on peut raisonnablement conclure en disant que se sentir victime est avant tout un ressenti personnel, on ne reçoit pas la qualification de victime, on se sent ou pas victime…

Pascal Mélin